Rétroactivité fiscale sur les dividendes versés en 2024 ?

Quelques réflexions sur un débat d’actualité en matière fiscale: la prochaine loi de finances, notamment, peut-elle revenir sur le taux du prélèvement auquel ont été soumis les dividendes versés en 2024 ?

A ce jour, les dividendes sont soumis en matière d’impôt sur le revenu:

– Lors de leur versement (année N) , à un prélèvement de 12,8% – Art. 117 quater du CGI,

– Lors de la liquidation définitive de l’impôt (après déclaration en N+1), à un prélèvement forfaitaire unique de 12,8% ou sur option au barème progressif après abattement, de l’impôt sur le revenu – Art. 200 A, 1 du CGI et 200 A, 2 du CGI

En synthèse:

  • Lors du versement des dividendes, ces derniers sont soumis à un prélèvement non libératoire (PFNL), constituant un acompte imputable sur l’impôt sur le revenu dû en N+1
  • Lors de la liquidation définitive, sur option:
    • Soit le dividende est soumis à l’impôt sur le revenu établi par application d’un prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 12,8%. Le PFNL est à alors imputable sur le PFU.
    • Soit le dividende est soumis à l’impôt sur le  revenu au barème progresse. Le PFNL est à alors imputable sur l’impôt dû.

Le PFNL comme son nom l’indique n’est pas une imposition forfaitaire à caractère libératoire, de sorte que les contribuables ne peuvent légitimement pas s’attendre à ce que ces revenus soient libérés de l’impôt (Voir a contrario : Décision n° 2014-435 QPC du 5 décembre 2014).

Il ressort de la jurisprudence du Conseil Constitutionnel que par exception aux dispositions de valeur législative de l’article 2 du code civil, le législateur peut, pour des raisons d’intérêt général suffisant, modifier rétroactivement les règles que l’administration fiscale et le juge de l’impôt ont pour mission d’appliquer.

Par ailleurs, l’application rétroactive de la législation fiscale se heurte à une double limite:

–  Elle doit respecter le principe de non-rétroactivité des peines et sanctions (Article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen),

– Elle doit respecter les décisions de justice passées en force de chose jugée.

Ainsi, le principe de non rétroactivité des lois n’a valeur constitutionnelle qu’en matière répressive. Sous quelques réserves, aucune norme de valeur constitutionnelle ne garantit un principe dit de « confiance légitime ».

 

Sous la réserve de la qualification d’un intérêt général suffisant, et de celles exprimées supra, il est donc parfaitement loisible au législateur de modifier à la hausse: l’impôt sur le revenu, le PFNL et le PFU pour les revenus perçus en 2024.

Pour aller plus loin, voir notamment :

 – Sécurité juridique : exceptions à la petite rétroactivité et protection des attentes légitimes

– Décision du Conseil Constitutionnel n°2013-682 DC sur le motif exclusivement financier