L’opposition à contrôle fiscal

L’administration des impôts contrôle les déclarations ainsi que les actes utilisés pour l’établissement des impôts, droits, taxes et redevances (Article L 10 du LPF). Elle dispose d’un pouvoir de vérification afin qui lui soient présentés  les documents visés notamment aux articles 54, 98, 286, I-4°, du CGI:

  • Tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l’exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration,
  • Tous renseignements susceptibles de justifier l’exactitude des chiffres déclarés et, notamment, tous éléments permettant d’apprécier l’importance de la clientèle, la communication du livre-journal et du document prévus à l’article 99  et de toutes pièces justificatives,
  • Toutes justifications nécessaires à la fixation des opérations imposables,
  • Dans le cadre des visites domiciliaires prévues par l’article L 16 B du LPF, aux cas d’obstacle à l’accès aux données informatiques.

L’article L74 du LPF prévoit ” Les bases d’imposition sont évaluées d’office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers”

Ces dispositions visent tous les contribuables auxquels la loi fait obligation de représenter des documents (le cas échéant informatisés) à l’appui de leurs déclarations.

Il suffit que le contrôle soit empêché du fait du contribuable lui-même ou du fait d’un tiers.

Un arrêt de la CAA de Versailles en date du 31 janvier 2024 a précisé que l’envoi de courriers non réclamés ne suffisent pas à caractériser l’opposition; encore faut-il que le vérificateur se soit présenté au siège de la sociétés et ait constaté l’absence de tout représentant. 

Affaire à suivre….

L’évaluation d’office applicable en cas d’opposition à contrôle peut être en principe établie dès l’échec de la première tentative de vérification.

Toutefois la doctrine administrative prévoit:

Il est toutefois recommandé au service de nuancer son attitude suivant le degré de gravité des événements auxquels il doit faire face.
 
Ainsi, si l’opposition individuelle ou collective se déroule sans autre incident, ou n’est accompagnée que de simples outrages par gestes, paroles ou menaces, le service doit avoir soin de surseoir à l’imposition d’office et de procéder auparavant à la « mise en garde » du contribuable, cette opération consistant :
  • soit pour l’agent chargé du contrôle à revenir chez le contribuable peu de temps après le premier échec, de préférence inopinément, en compagnie d’un employé supérieur ou d’un autre agent vérificateur,
  • soit pour l’employé supérieur, ou même le directeur, éventuellement suppléé par l’un de ses collaborateurs immédiats, à convoquer le contribuable dans ses bureaux, afin d’appeler son attention sur les conséquences, s’il persiste dans son opposition, de la mise en œuvre à son encontre de l’ensemble des procédures administrative et judiciaire prévues par la loi.
 
Si, à la suite de cette mise en garde (généralement deux mises en garde sont effectuées) , le contribuable, préalablement averti qu’il peut se faire assister d’un conseil, persiste dans son attitude négative, l’évaluation d’office des bases d’imposition doit être effectuée.
 
Il en sera de même si, la vérification ayant été entreprise à la suite de la mise en garde, de nouveaux incidents se produisent au cours des opérations de contrôle.
 
Lorsqu’au contraire, l’opposition individuelle ou collective à contrôle est assortie de violences graves, la mise en garde est exclue et il doit être procédé, sans plus attendre, à l’évaluation d’office des bases d’imposition
ELEMENTS DE PROCEDURE:

La procédure de taxation d’office est applicable sans qu’il y ait lieu à procéder à une mise en demeure (Art. L 67 du LPF).

La base d’imposition peut être fixée par référence au chiffre d’affaires ou, (…)  au volume de vente propre au redevable ou à l’opération en cause ou réalisé pour une ou plusieurs opérations comparables ou par une ou plusieurs entreprises comparables (Art. L 67 B du LPF).

Par principe, les bases ou éléments servant au calcul des impositions d’office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. Toutefois, ce principe n’est pas applicable en cas d’opposition à contrôle fiscal (Art. L 76 al. 2 du LPF).

La doctrine prévoit “quand même”:

Cette notification peut être envisagée par le service pour interrompre la prescription ou, d’une manière générale, dans tous les cas où cela lui paraît utile.
 
Elle n’entraîne pour l’administration ni renonciation au droit d’évaluation d’office qu’elle tient de la loi, ni renversement de la charge de la preuve en cas d’instance contentieuse ultérieure.
 


Le contribuable conserve toutefois le droit de présenter une réclamation contentieuse (Art. L 76 A du LPF) et supportera la charge de la preuve.

CONSEQUENCES FISCALES:

– Le bases d’imposition sont évaluées d’office: l’administration évalue elle-même les bases d’imposition selon une procédure excluant notamment le caractère contradictoire,

Une majoration de 100% des droits rappelés ou aux créances de nature fiscales (que si le contribuable a pris personnellement part à l’opposition par application du principe de responsabilité personnelle en matière pénale et du principe d’individualisation des peines) (Article 1732 du CGI et CE QPC 9e ch. 28-9-2020),

– Une interdiction de participer aux travaux des commissions administratives des impôts,

– Un intérêt de retard s’ajoute classiquement,

CONSEQUENCES PENALES:

Une sanction pénale est encourue (Article 1746 du Code Général des Impôts).

1. Le fait de mettre les agents habilités à constater les infractions à la législation fiscale dans l’impossibilité d’accomplir leurs fonctions est puni d’une amende de 25 000 €, prononcée par le tribunal correctionnel. En cas de récidive de cette infraction, le tribunal peut, outre cette amende, prononcer une peine de six mois d’emprisonnement.

2. L’opposition collective à l’établissement de l’assiette de l’impôt est punie de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende.

A noter: Les dispositions de l’article L. 228 du livre des procédures fiscales ne sont pas applicables aux infractions définies au présent article (obligation de dénonciation au Parquet et avis préalable et conforme de la Commission des Infractions Fiscales).

EN PRATIQUE:
  • Récupérer au plus vite la proposition de rectification (généralement notifiée par application de la doctrine),
  • Vérifier l’intégralité des calculs de la DGFiP,
  • Récupérer au plus vite les pièces justificatives des charges (en fonction du pourcentage de charges éventuellement admis par la service par application du principe de réalisme économique), et surtout pour justifier de la TVA déductible à faire admettre (aucune TVA déductible n’étant généralement admise à défaut de pièce,
  • Vérifier les taux de TVA appliqués,
  • Préparer la réclamation contentieuse (conservatoire puis définitive) afin de solliciter un sursis d’imposition,
  • S’attendre à user et à abuser d’Excel …. 
  • Se rappeler que le contribuable supporte la charge de la preuve.