La qualification fiscale de l’activité des influenceurs

Rappels sommaires

La Cour d’Appel de Paris, dans un arrêt du 10 février 2021, définissait l’influenceur comme “une personne active sur les réseaux sociaux qui, par son statut, sa position ou son exposition médiatique, est capable d’être un relais d’opinion influençant les habitudes de consommation dans un but marketing”.

L’article L 7123-2 du Code du Travail dispose que “Est considérée comme exerçant une activité de mannequin, même si cette activité n’est exercée qu’à titre occasionnel, toute personne qui est chargée:

– Soit de présenter au public, directement ou indirectement par reproduction de son image sur tout support visuel ou audiovisuel, un produit, un service ou un message publicitaire;

– Soit de poser comme modèle, avec ou sans utilisation ultérieure de son image”.

La  LOI n° 2023-451 du 9 juin 2023, en son article 1er, définit l’activité d’influence commerciale par voie électronique: 

“Les personnes physiques ou morales qui, à titre onéreux, mobilisent leur notoriété auprès de leur audience pour communiquer au public, par voie électronique, des contenus visant à faire la promotion, directement ou indirectement, de biens, de services ou d’une cause quelconque exercent l’activité d’influence commerciale par voie électronique.”

Qualification proposée par Bercy

Un Guide a été publié en juillet 2023 par le Ministère de l’Economie. L’analyse développée – sans doute opposable à l’administration – méritera d’être confirmée par le juge de l’impôt. Ce guide précise quelle qualification fiscale retenir (hors cas de l’exercice en société) :

  • si mon activité de création de contenu vise à faire la promotion de biens ou de services en contrepartie d’un bénéfice économique ou d’un avantage en nature, je renseigne mon activité au sein du guichet unique selon la catégorie “activités de service – services d’information – influenceur et créateur “. Mon activité est commerciale (je suis immatriculé au registre du commerce et des sociétés et au registre national des entreprises), mes revenus sont déclarés en BIC et je suis affilié à l’URSSAF – SSI ;

  • si mon activité de création de contenu ne vise pas à faire la promotion de bien ou de services en contrepartie d’un bénéficie économique ou d’un avantage en nature, je renseigne mon activité au sein du guichet unique selon la catégorie “activités de service – services d’information – Community manager, ergonome web, blogueur professionnel, rédacteur web”. Mon activité est indépendante (je suis immatriculé au seul registre national des entreprises), mes revenus sont déclarés en BNC et je suis affilié à l’URSSAF- SSI ;

  • si mon activité de création de contenu est une activité de création artistique, je renseigne mon activité au sein du guichet unique selon la catégorie ” Activités de services – Arts, culture et divertissement – Activités créatives, artistiques et de spectacle – Vidéaste, vlogueur, blogueur”. Mon activité est indépendante (je suis immatriculé au seul registre national des entreprises), mes revenus sont déclarés en BNC ou en précompte par un tiers diffuseur et je suis affilié, après validation, à la sécurité sociale des artistes auteurs.

Activité mixte

Que faire en cas d’activité mixte ? La règle dite du cumul s’applique alors:

L’article 155 I du CGI prévoit : 

I. – 1. Lorsqu’une entreprise industrielle ou commerciale étend son activité à des opérations dont les résultats entrent dans la catégorie des bénéfices de l’exploitation agricole ou dans celle des bénéfices des professions non commerciales, il est tenu compte de ces résultats pour la détermination des bénéfices industriels et commerciaux à comprendre dans les bases de l’impôt sur le revenu.

2. Lorsqu’un titulaire de bénéfices non commerciaux étend son activité à des opérations dont les résultats entrent dans la catégorie des bénéfices de l’exploitation agricole ou dans celle des bénéfices industriels et commerciaux, il est tenu compte de ces résultats pour la détermination des bénéfices non commerciaux à comprendre dans les bases de l’impôt sur le revenu.

L’application de l’article 155 du CGI est subordonnée à deux conditions cumulatives : 

Si l’activité industrielle ou commerciale est prépondérante et s’il existe effectivement un lien étroit entre celle-ci et l’activité non commerciale accessoire, il est alors fait masse de chiffres d’affaires. Le résultat imposable de l’ensemble des activités exercées est déterminé suivant les règles propres aux bénéfices industriels et commerciaux. 

Si l’activité non commerciale est prépondérante et s’il existe effectivement un lien étroit entre celle-ci et commerciale accessoire, il est alors fait masse de chiffres d’affaires. Le résultat imposable de l’ensemble des activités exercées est déterminé suivant les règles propres aux bénéfices non commerciaux.

Rappel des seuils micro et de l’abattement

La qualification fiscale est loin d’être neutre au regard des régimes d’imposition applicables. Ainsi, en dessous des seuils indiqués, le bénéficie imposable sera déterminé par application d’un abattement forfaitaire sur le chiffre d’affaires brut réalisé. Cet abattement couvre supposément tous les frais et charges supportés.

Activité BNC:

  • Seuil d’application du régime micro: 77 700 € de CA annuel HT
  • Abattement forfaitaire de 34 %

Activité BIC:

  • Seuil d’application du régime micro: 77 700 € de CA annuel HT
  • Abattement forfaitaire de 50 %

TVA

Sauf application de régimes spéciaux (par exemple le régime des droits d’auteur, le régime de la franchise, …), les prestations rendues par un influenceur sont soumises à la TVA au taux de droit commun de 20%. 

Sous réserve de l’examen des règles de territorialité, la TVA doit donc en principe être collectée, déclarée et payée. La TVA déductible sur les achats de biens et services et sur les immobilisations est en contrepartie déductible selon le régime de droit commun.

CFE

La cotisation foncière des entreprises (CFE) est due par les professionnels exerçant à titre habituel une activité non salariée au 1er janvier de l’année d’imposition.

Elle sera donc dû annuellement par l’influenceur.